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LES DEUX FRATERNITÉS

dont les cheveux d’un blond foncé, très simplement relevés, auréolaient un fin visage au teint clair et aux yeux graves.

— Bonsoir, mesdemoiselles, dit au passage Prosper en soulevant sa casquette.

— Bonsoir, monsieur Louviers.

Il s’engagea dans l’escalier étroit, aux marches usées, et s’arrêta au troisième étage. Il sortit une clé de sa poche, l’introduisit dans la serrure et entra, après avoir frotté une allumette. Il se trouvait dans une pièce basse, grande, où se voyaient, outre un fourneau et une vaste table, une armoire et un lit en merisier d’assez piètre apparence. Il régnait dans cette chambre un grand désordre : des assiettes, des verres non lavés s’étalaient encore sur la table, des souliers éculés et de piteuses savates traînaient sur le sol carrelé.

— Brr ! on gèle ici ! murmura Prosper après avoir allumé la petite lampe à pétrole. Y a pas de crainte que cette satanée Zélie rentre un peu plus tôt pour chauffer le poêle !

En grommelant il se mit en devoir d’allumer le petit fourneau. De temps à autre, il bougonnait.

« Ah ça ! va-t-elle rentrer ? C’est pourtant pas mon affaire de m’occuper de ça !… Mais elle a une façon de mettre tout sur les bras des autres, celle-là !… Sûr qu’elle n’a pas été retenue à l’atelier. Mais elle aura été voir les étalages des boulevards, se remplir d’envie jusque-là… comme moi, pardi ! Ah ! elle est bien ma sœur,