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Page:Delly - Les deux fraternités, ed 1981.djvu/226

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LES DEUX FRATERNITÉS

jeune âme droite et pure, très bonne, mais sur laquelle avait passé le souffle désespérant de l’athéisme. Suzanne lui avoua loyalement qu’elle avait cherché le suicide.

— J’étais, il est vrai, sous l’empire d’une fièvre violente ; mon cerveau se trouvait affaibli par la maladie, exaspéré par les menaces de cet homme. Oh ! maman, que j’ai souffert ! que j’ai souffert !

— Ma pauvre petite fille ! Et tu ne connaissais pas Dieu, tu n’avais pas les secours de notre bien-aimée religion. Mais maintenant, dis, ma chérie, tu voudras bien apprendre à prier ?

— Oh ! oui, apprenez-le-moi, maman ! Voyez-vous, sans espérance au-delà de la vie, l’existence est si sombre, si décourageante !

Louis et Lucien étaient fous de leur jeune sœur ; ils ne savaient qu’imaginer pour lui causer quelque plaisir. Elle leur témoignait une affection reconnaissante et les remerciait avec un joli sourire en disant :

— Combien vous êtes bons ! Je ne suis pas habituée à être gâtée comme cela.

Mais, sous la joie profonde causée à la jeune fille par la tendresse de sa mère et de ses frères, Micheline sentait une souffrance toujours vive, dont elle avait peur de soupçonner la nature.

Le docteur permit enfin, par un jour ensoleillé, que la malade quittât sa chambre pour venir s’asseoir dans la salle à manger. Micheline l’installa dans un fauteuil, près d’une table