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LES DEUX FRATERNITÉS

avait gracieusement incliné la tête en réponse au salut de Cyprien.

— C’est Mme de Mollens… Mlle Césarine m’a appris justement ce matin qu’elle venait tous les jours ici pour panser la vieille Leblanc et faire la lecture du journal au père Mathieu.

— Ah ! oui, la femme de ton marquis ! dit Prosper d’un ton gouailleur. Il me semblait bien la reconnaître… Encore une manière de poser, ça !

Cyprien lui jeta un coup d’œil de travers.

— Souhaite qu’il y ait beaucoup de poseuses comme celle-là !… Si tu crois que ça doit être amusant pour elle de quitter son hôtel pour s’en aller dans des chambres plus ou moins propres soigner une pauvre rabâcheuse comme la mère Leblanc ou répéter plusieurs fois la même phrase au père Mathieu qui ne comprend plus très bien ! Elle pourrait faire comme tant d’autres de son monde, se lever à midi après avoir passé la nuit au bal, courir les beaux magasins, se promener au Bois et faire admirer ses toilettes. Mais M. de Mollens n’aurait pas pris une femme dans ce genre-là, il a choisi celle-ci, qui est un ange, au dire de tous ceux qui l’approchent.

— Un ange qui a une voiture à deux laquais et qui va s’acheter des meubles dans un des plus chics magasins de Paris ! ricana Prosper.

— Eh bien ! qui est-ce qui en profite ? Qui est-ce qui a fait ces meubles-là ? Des ouvriers, dont c’est le gagne-pain. Alors, s’il n’y avait plus