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Page:Delly - Les deux fraternités, ed 1981.djvu/35

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LES DEUX FRATERNITÉS

Moi qui passais toutes mes journées devant une table à monter des fleurs pour garnir les chapeaux des bourgeoises riches, je m’en payerai maintenant sans travailler !

— Et les frères Vrinot me fabriqueront une auto ! ajouta Prosper en rejetant en arrière son chapeau d’un geste fiévreux. Non, ce qu’on va les épater tous !

Zélie appuya son menton sur sa main et réfléchit quelques instants. Puis, levant les yeux vers Prosper :

— Dis donc, tu n’as pas l’idée tout de même d’aller raconter ça aux voisins ?

— Hein ! Pourquoi ?

— Hé ! grand nigaud, tu serais bien avancé ! Te rappelles-tu les ennuis du père Michaud quand il a gagné son lot de cent mille francs ? C’était à qui viendrait quémander auprès de lui.

Prosper saisit vivement les mains de sa sœur.

— Parbleu ! quelle sottise j’aurais faite ! Tu es une fille avisée, Zélie. C’est vrai qu’ils tomberaient tous sur nous comme des mouches sur du miel !

— D’autant que tu leur as bien monté la cervelle avec tes théories sur le partage du capital, dit Zélie d’un ton narquois. Qui est-ce qui serait collé s’ils venaient te demander de les mettre en pratique ?

Prosper fronça violemment les sourcils.

— Je voudrais bien voir ça ! C’est l’argent de mon oncle, je n’ai pas à le partager avec des étrangers…