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Page:Delly - Les deux fraternités, ed 1981.djvu/50

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LES DEUX FRATERNITÉS

une petite surprise en si grand mystère que je n’ai moi-même rien pu en surprendre.

Il serra vigoureusement la main de l’ouvrier et s’engagea dans l’étroit corridor… Sur le seuil de sa porte se tenait Mlle Césarine. Elle dit avec un sourire qui rajeunit singulièrement son doux visage flétri :

— Les voilà tout joyeux, monsieur ! Les pauvres ! ils n’ont pas l’habitude de recevoir des visites ! Sans l’abbé Gaillet, Mme la marquise, qui entre quelquefois en passant, la petite Micheline Laurent et vous, monsieur, ils ne verraient pas âme qui vive en dehors de moi.

Le marquis pénétra dans une petite chambre pauvrement meublée et d’une scrupuleuse propreté. Un homme vêtu d’habits très vieux, mais fort nets, se tenait debout devant la fenêtre… Il fit un mouvement de côté, et la lumière du jour éclaira son visage — le même qui avait causé un jour tant de répulsion à Prosper et à Zélie.

Sans une hésitation, M. de Mollens alla à lui, la main tendue, un bienveillant sourire donnant une expression d’attirante douceur à sa physionomie un peu froide au premier abord.

D’un vieux petit fauteuil se leva une créature étrange, pauvre être au corps affreusement contourné, au visage d’une repoussante laideur. On n’eût su réellement quel âge lui donner. Ses yeux, singulièrement doux et expressifs, étaient ceux d’un tout jeune homme, presque d’un enfant, mais le crâne était entièrement dégarni comme celui d’un vieillard.