Page:Delrieu - Artaxerce, Giguet et Michaud, 1808.djvu/150

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alarmant qui répand sur cette situation le charme irrésistible qui provoque les applaudissements unanimes, au moment où Artaban épouvanté du danger de son fils, se jette sur la coupe fatale, l’arraque de la main de son fils, et avale d’un seul trait le poison.

Quelques critiques trop sévères ont cru voir dans cette situation (une des plus fortes qu’il y ait au théâtre), l’imitation du dénouement de Rodogune. Il suffira de faire le plus léger rapprochement entre ces deux situations, pour démontrer l’erreur de ces critiques. Dans Rodogune, qui a préparé le poison ? Cléopâtre… pour qui ? pour son fils… Pourquoi Cléopâtre le boit-elle ? pour tromper son fils et l’empoisonner avec elle… Certes, il ne faut pas une grande pénétration pour voir que dans Artaxerce les motifs et la situation sont diamétralement opposés, puisqu’Artaban n’a empoisonné la coupe que pour venger son fils, et ne la boit que pour le sauver. Je ne parle pas de l’intention d’Artaxerce, qui ne présente le poison à Arbace, que pour rendre plus éclatante sa justification. On voit assez combien cette intention s’éloigne et diffère de celle de Cléopâtre. Il n’est donc pas douteux que la coupe fatale préparée pour Artaxerce, passant de la main de ce prince sur les lèvres d’Arbace, et enfin devenant la punition d’Artaban, ne soit une idée neuve