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Page:Delrieu - Démétrius, Ladvocat, 1820.djvu/14

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Il partit… Je l’aimais, hélas ! avec tendresse.
Des transports amoureux ce n’était point l’ivresse ;
C’était le devoir seul ; et, même dans ce jour,
Je pleure mon époux, et j’ignore l’amour.
Loin de lui si long-temps aux fers abandonnée,
À l’opprobre, à la mort j’ai langui condamnée.
Alors j’étais du moins heureuse en mes douleurs ;
Je goûtais le plaisir de lui donner des pleurs.
Depuis quinze ans, l’exil m’a ravi l’espérance
De voir Démétrius, guidé par la vengeance,
Abusant Laodice et trompant les Romains,
Par miracle échappé de leurs barbares mains,
Pour remonter au trône où son peuple l’appelle,
Reparaître, attaquer une reine cruelle ;
Et, purgeant ses états de ce monstre odieux,
Venger, en l’immolant, moi, son père et les dieux.

ANTIOCHUS.

Madame ! commandez à votre injuste haine.
Daignez, en ma présence, épargner votre reine.
Quels noms injurieux osez-vous lui donner ?
Quand sa bonté pour vous aime à vous pardonner,
Quand par elle aujourd’hui votre bonheur commence,
Oubliez ses rigueurs, songez à sa clémence.

STRATONICE.

À sa clémence, prince ? Ardent à se venger,
Son cœur à la vertu fut toujours étranger.
Au trône encor sanglant seule elle osa prétendre.
Pour y placer son fils, daigne-t-elle en descendre ?
Sa main, en vous offrant le sceptre d’un époux,
Vous a-t-elle attesté sa tendresse pour vous ?
De la soif de régner qui toujours la dévore,
Ah ! prince, craignez tout ; craignez Héliodore.