Page:Delzant - Les Goncourt, 1889.djvu/122

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celant d’esprit et de larmes. Toutes les qualités d’écrivains et d’observateurs de MM. de Goncourt s’y sont resserrées et comme exaltées. Pas une longueur et pas un hors-d’œuvre. Un souffle poétique anime le récit : les chapitres se succèdent, courts et rapides, comme des strophes… L’art du récit s’efface sous les émotions qu’il excite ; on s’attendrit avant d’admirer. »

Malgré ce feuilleton, un des plus beaux que Paul de Saint-Victor ait écrit et quelques articles moins sonores dans la presse, le succès du livre fut médiocre et la première édition traîna en longueur. Les auteurs n’étaient pas encore en possession de la renommée ; ils apportaient dans Renée, un type nouveau de jeune fille ; on le prit naturellement pour une figure de fantaisie et le livre, connu et apprécié par quelques artistes et par quelques lecteurs d’élite, vécut dans ces limbes de succès qui, maintefois, préparent plus sûrement l’avenir d’un beau livre que les débuts éclatants.

Un écrivain naturaliste qui s’était fait connaître par une étude d’une analyse subtile et d’un gris à la Flaubert, M. Henri Céard crut découvrir, dans Renée Mauperin, le filon d’un drame en cinq actes. Il l’écrivit et, à la fin du mois de décembre 1881, une lecture en fut faite dans le salon de Mme Alphonse Daudet qui, peu de jours avant, avait reçu ce mot de M. de Goncourt :

« 15 décembre 81.
« Chère Madame,

« Ne croyez pas qu’on ne pense pas à vous, au gentil ménage ; mais tout en ayant fini, il y a des corrections d’épreuves qui ne me laissent pas une minute.[1] Céard est en train de faire recopier Renée Mauperin. Quand ce sera fait, il

  1. Il s’agit de la publication de la Faustin que le Voltaire donnait en feuilleton et qui allait paraître en volume.