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Page:Demanche - Au Canada et chez les Peaux-Rouges, 1890.djvu/40

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AU CANADA ET CHEZ LES PEAUX-ROUGES

Du haut de la citadelle et de la belle terrasse de Frontenac, laquelle s’élève à 150 pieds au-dessus du fleuve, se déroule un magnifique panorama sur la cité même, le port avec sa forêt de mâts, les hauteurs de Lévis, le Saint-Laurent, en amont et en aval de la ville, la chaîne des Laurentides, l’île d’Orléans et ses verdoyants ombrages si recherchés des Québecquois pendant la belle saison. C’est le rendez-vous général des promeneurs, le vrai boulevard de Québec, qui, pour n’avoir qu’un vaste plancher en bois, n’en est pas moins très fréquenté. C’est là que se dresse le monument élevé le 8 septembre 1828 à la double mémoire de Montcalm et de Wolfe, les deux héroïques adversaires que la mort a recouverts du même linceul dans les plaines d’Abraham. Les restes de Montcalm sont déposés dans l’église des Ursulines, à Québec. Quant à Wolfe, il est inhumé dans l’église paroissiale de Greenwich, en Angleterre, et non, comme on le croit généralement, dans l’abhaye de Westminster.

De la ville basse on accède à la partie haute de la cité au moyen d’un élévateur ou par des rampes très accentuées que de vigoureux petits chevaux montent et descendent d’une allure aussi rapide qu’assurée. La ville haute remonte à la fondation de Québec. C’est là surtout que se rencontrent, avec leurs trottoirs en bois, les rues tortueuses où l’on enfonce dans la boue à la mauvaise saison et où un étranger, et même un citadin, à peine à se reconnaître le soir, à la faible lueur des rares becs de gaz. C’est aussi le centre des vieux souvenirs, des monuments et des institutions publiques et politiques.

Au nombre de ces vieux souvenirs se trouve la légende du Chien d’Or. À deux pas de la terrasse de Frontenac, se dressait naguère une vieille maison dont le fronton portait une énorme plaque de marbre entourée d’un encadrement et d’une tablette. Sur la plaque, un chien assis, rongeant un os, avec cette inscription :

Je suis un chien qui ronge l’os ;
En le rongeant je prends mon repos ;
Un temps viendra qui n’est pas venu
Que je mordrai qui m’aura mordu.
1736

D’après une tradition populaire, M. Philibert, propriétaire de cette maison, aurait été assassiné par M. de Repentigny, et sa veuve aurait