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Page:Demanche - Au Canada et chez les Peaux-Rouges, 1890.djvu/80

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AU CANADA ET CHEZ LES PEAUX-ROUGES

Le curé Labelle s’est fait l’apôtre de la colonisation française au nord du Saint-Laurent. Grâce à son influence et à ses efforts, des routes ont été percées, des chemins de fer créés, des villages fondés dans mainte région couverte de forêts. Que de fois ne l’a-t-on pas vu, à Ottawa comme à Québec, arpenter les couloirs du Parlement, encombrer de sa puissante personne les bureaux des ministères, afin d’obtenir les subsides nécessaires à ses pacifiques entreprises ! À peine a-t-il achevé de plaider sa cause, et gagné son procès, qu’il vole, en compagnie de son inséparable pipe, à la création de nouveaux centres de population, visitant et encourageant sans cesse ses colons qui lui apportent le concours le plus précieux pour le succès de ses entreprises en mettant si bien en pratique ce précepte de l’Évangile : Croissez et multipliez. Et comme le Canada semblait ne pas suffire à son ambition, il est venu en mission dans la vieille France en vue de diriger vers la France d’Amérique un fort courant d’émigration. Rien ne lui résiste et tout lui réussit ; aussi dans le pays l’a-t-on surnommé le Roi du Nord. Malgré ses multiples occupations, il n’oublie pas les devoirs de son ministère, et les habitants de Montréal se souviennent encore d’un hiver rigoureux pendant lequel le curé Labelle est arrivé, à la tête de ses paroissiens, apportant aux pauvres de la ville, qui en manquaient totalement, le bois de chauffage aussi indispensable pour eux que le pain de chaque jour.

Parti de France, sur le Damara, avec la délégation française, le curé Labelle n’a cessé d’être, depuis son retour au Canada, l’objet de démonstrations tout à la fois affectueuses et enthousiastes. Mais c’est à Saint-Jérôme que les paroissiens du curé lui préparaient, ainsi qu’à la délégation, une réception des plus chaleureuses. Déjà à Sainte-Thérèse les ovations avaient commencé ; les habitants, sous la conduite du maire, du clergé, des professeurs du collège, étaient rangés sur le quai de la gare pour acclamer les délégués et leur présenter une adresse de bienvenue à l’ombre d’un magnifique drapeau blanc fleurdelisé. Ce fut bien autre chose à Saint-Jérôme. La gare de cette petite ville disparaissait sous les drapeaux et les arceaux de verdure, et un arc de triomphe avait été dressé pour la circonstance. Les habitants de Saint-Jérôme, ainsi que ceux des paroisses voisines, tous de race française, se pressaient en flots tumultueux autour du débarcadère. À peine le train spécial, gracieusement mis à la disposition des délégués