Page:Demolder - Le Jardinier de la Pompadour, 1904.djvu/271

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Il fit un pas pour reconduire Jasmin. Celui-ci insista :

— Je ne suis plus à Bellevue. J’ai repris mon ancien métier de fleuriste avec l’aide de ma femme, et comme autrefois je façonne les jardins, je fais des corvées et j’ai pensé qu’en cette saison on pourrait m’occuper.

— En ce cas, c’est une autre affaire. Viens voir le maître jardinier, un nouveau, pas commode.

Il conduisit Jasmin vers les serres ; un homme y donnait des ordres brefs à des jeunes gars occupés à lever les paillassons qui interceptaient le soleil. Buguet lui fit sa demande que le portier appuya en disant :

— Il sait son métier.

— D’où sors-tu ? demanda le maître.

— De Bellevue.

— Je n’ai point de place ici pour les gens qui ont servi chez la catin du Roi. Monsieur le comte me chasserait si je t’embauchais !

Pendant quelques secondes Buguet resta hébété, puis les larmes lui montèrent aux yeux et il s’esquiva comme un voleur, évitant le concierge, qui ne le vit pas sortir.

Cette tentative fut la dernière. À partir de ce jour Buguet s’enferma chez lui. Mais l’ivraie qui avait envahi son jardin étouffait aussi son courage. Il ne s’occupa plus guère que des arbres à fruits.