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Et puis, le souvenir de notre propre passé ne serait-il pas lié d’une manière intime au souvenir du passé des autres ? Quelle situation pour le coupable, marqué au fer rouge pour l’éternité ! Par la même raison, les haines, les erreurs se perpétueraient, creusant des divisions profondes, ineffaçables au sein de cette humanité déjà si déchirée. Dieu a bien fait d’effacer de nos faibles cerveaux le souvenir d’un passé redoutable. Après avoir bu les eaux du Léthé, nous renaissons à une vie nouvelle. Une éducation différente, une civilisation plus large font évanouir les chimères qui hantèrent autrefois notre esprit. Allégés de ce bagage encombrant nous avançons d’un pas plus rapide dans les voies qui nous sont ouvertes.

Cependant, ce passé n’est pas tellement effacé que nous ne puissions en entrevoir quelques vestiges. Si, nous dégageant des influences extérieures, nous descendons au fond de notre être ; si nous analysons avec soin nos goûts, nos aspirations, nous découvrirons des choses que rien dans notre