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la verdure dorée


Et la vigne que le tison d’automne embrase
Et l’odeur des lilas ; et j’achève ma phrase,
Amour, car il serait plaisant que l’univers
S’animât pour orner ma tristesse et mes vers.
Déjà j’en ai trop dit et déjà tu t’amuses
À voir que ma douleur s’efface chez les Muses
Qui passent en riant leur mouchoir sur mes yeux.
Tu ris de voir les mots des pleurs victorieux
Et que mon désespoir aux rythmes s’atténue.
C’est vrai. Mais la voici rêveuse et demi-nue ;
Ses cheveux sont pareils à son bracelet d’or ;
Lasse des voluptés, elle songe et s’endort ;
Une rose est moins rose et quand elle s’éveille
Je sens mon cœur léger comme une aile d’abeille
Et je vois frissonner sur des lauriers fleuris
Dans l’aube et dans l’azur de rouges colibris,
Et je… Tais-toi. Je suis triste comme une larme.
Ne souris pas de mes alarmes et désarme
Ton arc robuste encor depuis quatre mille ans
Qu’il darde aux madrigaux des traits étincelants,
Et tandis que la nuit dans mon cœur va descendre
Laisse-moi remuer ma douleur et la cendre.