Page:Derème - La Verdure dorée, nouv. éd.djvu/39

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
15
la verdure dorée

Mésanges, accourez, mes lointaines pensées !
Ô souvenirs, rameaux flétris, branches cassées…

Oui, j’aurais dû, ce soir, te dire tout cela,
T’avouer les penchants où mon cœur s’écoula
Et te montrer au loin ces figures d’argile,
Et nous aurions pleuré de sentir si fragile
Notre amour qui s’éveille et frissonne au soleil
D’automne, notre amour incassable et pareil
Aux beaux jouets de notre enfance. Mais qu’importe,
Si l’espérance encore ouvre la vieille porte ?
Elle parle ; sa voix illumine tes yeux ;
Son regard verse en nous la lumière des cieux.
Sous le manteau de pourpre et la cuirasse triple,
Cheveux au vent, partons pour le vaste périple.
Les merles se sont tus devant l’astre éclatant ;
Et le navire aux voiles blanches nous attend
Au port, prêt à cingler vers les îles lointaines
Où le bonheur fleurit aux rives des fontaines.
Je ne sais quelle main nous pousse. Nous rirons
Des rafales soufflant dans leurs rauques clairons ;
Et, comme ivres, car l’Univers nous est complice,
Les flots noirs et cabrés nous seront un délice.

Ainsi nous voguerons sur l’eau cruelle ou sur
L’eau calme, sous tes coups, tonnerre, ou sous l’azur,
Sous la lune indulgente ou dans l’ombre sauvage.
Et plus tard n’ayant vu briller aucun rivage,