Page:Des Érables - La guerre de Russie, aventures d'un soldat de la Grande Armée, c1896.djvu/53

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Officier !… L’ordre ministériel, me conférant le grade si longtemps convoité, n’avait pas été lu en tête de l’escadron ; l’empereur, qui ne se souciait ni des lois ni des règles, ne m’avait pas fait sortir des rangs dans un moment de bonne humeur… Mais mon colonel avait pris l’engagement de me faire « avancer » et je considérais la chose comme régulièrement faite.

D’ailleurs, on n’avait guère le temps de discuter beaucoup ; à défaut d’arrêtés officiels, nous avions le canon qui, rendant les places vacantes, offrait des chances à ceux qui demeuraient à peu près valides.

Si le choix n’était pas toujours heureux, l’erreur, par contre, pouvait se réparer du jour au lendemain : une balle de fusil tue proprement le plus vaillant des officiers comme le plus incapable et l’on devait se contenter de remplir les vides tant bien que mal et le plus tôt possible.

En tous cas, si je n’étais pas un grand savant, au point de vue de la discipline et de la bravoure on n’avait rien à me reprocher ; de plus, j’étais ce qu’on appelle un chanchard : la mort semblait ne pas vouloir de moi.