énergumènes emphatiques, que d’anéantir l’Art par des violences d’iconoclaste, de supprimer l’antiquité, de lacérer les Raphaël, de briser les statues et les basreliefs, comme si les chefs-d’œuvre du passé n’étaient pas le patrimoine glorieux et respectable de l’humanité. Combien les audaces de 1832 étaient loin de ces intempérances brutales ! En 4832, il fallait rompre à tout prix avec une tradition mal comprise : on avait en face de soi des pseudo-classiques entêtés, dépourvus de talent, inintelligents des chefs-d’œuvre dont ils s’autorisaient ; plus d’un alors, surtout parmi les enfants perdus de la nouvelle école, plus d’un a dépassé le but ; mais le Romantisme, dans ses affirmations les plus téméraires, n’a jamais nié la tradition, ni renié le passé. A plus forte raison les chefs, les interprètes autorisés et officiels de l’école, n’ont-ils jamais donné dans ces extravagances qu’il était réservé à notre temps de connaître. Victor Hugo, hier encore, n’écrivait-il pas des pages pieuses et filiales à la gloire d’Eschyle ? Sainte-Beuve, qui a réuni toutes les intelligences, devait posséder plus que tout autre et mieux exprimer que qui que ce soit le sentiment de la perfection : « Que l’admiration de nous à eux, des modernes aux vrais anciens, à ceux qui ont le mieux connu le beau, s’entretienne de phare en phare, de colline en colline, et ne s’éteigne pas ; que l’enthousiasme de ce côté n’aille pas mourir, — ce serait une diminution du génie humain lui-même, — non un enthousiasme crédule, aveugle et indigne d’eux comme de nous, mais un enthousiasme léger, clairvoyant,
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