Page:Des Roches - Les Missives.pdf/12

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voicy la troisiesme fois que ta force m’encourage de parler en public, où je ne puis m’empescher d’estre saisie d’un peu de crainte par l’exemple de Mantuan. Il dit que le Tout-puissant apres avoir puni le premier pere de sa desobeissance, & mis hors du Paradis des delices, il le rendit fermier de la terre, avec condition d’en avoir soing, de croistre & multiplier. Dieu va au ciel, l’homme demeure sur la terre, qui estant nouvellement touchee par la main divine, devint si fertile que nos aieux (quasi sans pain) y vivoient en tous plaisirs : & firent en peu de temps naistre un grand nombre de beaux enfans. Le Seigneur qui avoit soing d’eux les voulut visiter plus doucement que la premiere fois : Adam le sçait, qui advise son espouse de la venuë du maistre. La mere prevoiant combien la chasteté donneroit d’ornement à la femme, pense que ceste faute de ne l’avoir pas assez gardee, avoit quelque chose de cõmun avec le larcin du fruict defendu : & pource (voulant dissimuler) elle cache soudain une partie de ses enfans au foin, en la paille, en la créche : l’autre est lavee, paree, acoustree selon son loisir. Mais le Seigneur plus prompt a des-ja resequé sa grandeur pour estre un de leur petitesse, qui reçoit ceste faveur en toute humilité : il regarde ce nouveau peuple d’un œil favorable & benin : il le bien-heure, l’un de la monarchie, l’autre du regne, l’autre de la principauté. La mere (toute pleine d’aise) fait venir ceux qui pour sõ peu de loisir n’estoiẽt du tout si bien parez : celuy dont la puissante main