Passant le trait volant d’un pas non mesuré.
Elle haste sans fin la cource diligente
Des Dragons accouplez, & de main violante
En mil & mille pars incessemment les point,
Redoublant les tourments qu’ils ne meritent point.
N’estant que sur Ida elle cherche Sicile,
Craint tout, n’espere rien, treuve tout difficile.
Ainsi voit on souvent se tourmenter l’oyseau,
Aiant laissé son nid dedans un arbrisseau :
Il craint pour ses petis (dont il cherche la vie)
Du vent, ou du serpent, ou de l’homme l’envie.
Lors elle pense voir son beau palais desert,
Resemblant la maison que la garde ne sert,
Dont les portes sont hors : prevoiant sa ruine,
Sans plus outre enquerir elle bat sa poitrine,
Arrache ses cheveux, rompt son accoustrement,
Et le pleur enserré redouble son tourment.
Les jaunissans espis sont froissez autour d’elle ;
Une glissante peur englace sa moëlle,
La voix meurt en sa bouche, & son esprit errant
La porte ça & là incessemment courant.
Arrivee au palais elle trouve l’ouvrage
Que sa Fille tissoit avant son mariage :
L’audacieuse araigne en ses filets plus fins
Avoit environné ces ouvrages divins
D’un sacrilege doid. La Mere desolee
Pasme dessus la toille & rend entremeslee
Sa muete complainte au labeur tant prisé,
Qui est demy rompu sus un mestier brisé.
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