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BETTY PETITE FILLE


parfois, mettant dans ses yeux noirs une flamme passagère et à ses lèvres une salive mousseuse et chaude.

Silencieusement Marthe l’enviait ; par une sorte de télépathie mystérieuse, elle lisait sur son visage contraint toutes les pensées qui tumultueusement couraient dans son cerveau.

À son tour elle devint audacieuse, manifestant son énervement par une gaîté bruyante hors de propos.

Assurées du secret, elles recommencèrent à fumer, avec des gestes mignards, des rires malicieux. Et le vieillard s’attardait, se complaisant auprès de cette jeunesse qui ranimait momentanément son hiver. Pourtant il ne devinait point le moteur caché de tant de coquetterie et d’amabilités, il l’aurait su que sans doute, il se serait sauvé, mécontent de l’impression qu’il produisait sur ces jeunes sens.

Mais si elles étaient ainsi auprès de lui, cela tenait justement à la divination instinctive de leur sécurité. Sans rien savoir de précis, elles sentaient que quoiqu’il eût voulu, il ne leur pouvait rien. Cette certitude les encourageait aux audaces, qu’elles n’auraient certes pas eues en présence d’un homme dans la force de l’âge, qui les aurait aussitôt maîtrisées par l’exaspération de sa virilité.