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BETTY PETITE FILLE


nette que quelque chose lui manquait soudain.

Cette gêne s’accrut, prenant une acuité quasi douloureuse.

Elle cessa de rire, un véritable sanglot lui montait à la gorge ; il lui semblait que de pleurer lui serait d’un infini soulagement.

Les violons et le banjo activaient leur rythme qui devenait endiablé.

Tous les yeux brillaient, les seins des femmes palpitaient, le masque des hommes se crispait en un rictus bestial. La bête se réveillait en tumulte, comme dans la savane immense.

Betty eut un cri léger, et croula en arrière sur le dossier de sa chaise ; un afflux de sang lui était monté au visage, un cerne large ombra brusquement ses grands yeux noirs. Puis son épiderme prit une teinte d’ivoire et elle respira plus librement.

Sa mère inquiète s’était penchée, mais incapable de prononcer une parole, elle lui sourit tristement.

Un frisson la secouait encore et ce frémissement révélateur, elle s’efforçait de le dompter.

Elle murmura :

— J’ai avalé de travers, ça m’a fait mal !

On le crut, cette enfant était si naïve !

La musique avait cessé, le chuchotement discret des conversations se fit plus distinct. Alors la