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BETTY PETITE FILLE

— Bien sûr qu’elle en a du pèze, tu ne penses pas qu’elle paye toutes ses dépenses avec des j’tons d’ garçons d’ café.

Ses deux complices s’entreregardèrent.

Max sérieux poursuivit :

— Et tu crois qu’elle raquera ? Tu penses que Charles ne travaille pas pour la gloire.

Betty eut une minute d’ahurissement ; l’idée que sa mère pût donner de l’argent à un homme au lieu d’en recevoir, lui paraissait une monstruosité. Puis le souvenir de Léontine, par un enchaînement logique, lui revint à l’esprit.

Elle eut un frémissement bref ; une courte hésitation la fit haleter. Devant ses yeux passa la vision de la vengeance accomplie.

Très froide, les lèvres pincées, elle émit :

— Il n’a qu’à cogner dessus !

Les autres, malgré leur cynisme, reculèrent comme épouvantés ; cette proposition de la gamine les frappait par sa honteuse inconscience. Mais le besoin pécuniaire les talonnait, Charles revint à des sujets pratiques. Il gouailla :

— Elle aime ça ?

La fillette maintenant sentait un remords glisser en elle, mais sa vanité l’empêchait de se rétracter. Pour toute réponse, elle haussa les épaules et les jeunes gens virent dans ce geste un acquiescement.