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BETTY PETITE FILLE

Mais dans son petit cerveau déformé précocement, tout se mêlait. Comme sa mère elle aspirait à joindre l’utile à l’agréable, de donner un peu d’elle-même et de recevoir beaucoup en échange.

Et cette idée intime la poussait vers l’Opéra. Ne disait-on point couramment que dans ce quartier, des vieux messieurs très riches, débauchaient des petites filles pour les couvrir de soie et de bijoux. Si vraiment cette chance pouvait lui échoir !

Elle s’en allait roulant de la hanche, essayant de se rendre aguichante par l’audace de ces attitudes. Ayant le sens de la justesse et du joli, elle évitait le ridicule que devait entraîner pareille tentative ; il ne subsistait qu’une apparence de vice qui émouvait de pitié.

Rue de Castiglione, elle s’arrêtait longuement aux vitrines des bijoutiers, admirant les gemmes multicolores, disposées avec art. En vérité elle n’avait aucun désir, saisissant que tout cela lui serait inutile. Elle enrageait contre sa jeunesse qui la privait d’une infinité de satisfactions. Cependant, elle s’attardait, jugeant qu’il était dans son rôle de manifester de l’envie pour toutes ces richesses accumulées et tentatrices.

Quand un homme intrigué, la fixait, elle avait