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BETTY PETITE FILLE

Cela suffit pour arrêter net l’interrogatoire. Après le départ de la bonne, pourtant, elle reconnut :

— Cette Léontine est un véritable bâton de poulailler.

Betty approuva, mais ensuite baissa le nez pour ricaner. Elle ne souhaitait pas que l’on changeât d’officieuse, certaine de la discrétion de celle-ci.

En silence elles mangèrent, ne pensant point qu’elles eussent quelque chose de commun. La mère reprise par les soucis quotidiens, ne songeait pas à se confier un peu à Betty. Encore, elle la considérait comme une gamine, se refusant à s’apercevoir qu’elle était femme, autant de cerveau que de corps. Cette constatation l’aurait vieillie, elle préférait jouer à la poupée, ce qui lui permettait de conserver des illusions, à défaut d’autre chose.

La fillette de son côté, rêvait, épiait, essayant de deviner ce qu’on lui cachait, se forgeant des espoirs qui ne seraient jamais réalisés.

Trop grande pour être dorlotée, trop jeune pour être traitée en compagne raisonnable, elle restait esseulée, dans une situation mixte, qui favorisait la lente déformation morale. En même temps, elle manquait d’une affection vivante, qui aurait fourni un aliment à son besoin instinctif de tendresse.