Page:Des artistes, première série, 1885-1896, peintres et sculpteurs, 1922.djvu/164

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

autres et plus compliquées. À mesure que se révèlent les phénomènes de la vie inconnus des vieux ancêtres et qui ajoutent à notre désir de connaître, à nôtre pouvoir de sentir, à mesure que le génie de l'homme multiplie les pages techniques et met aux mains de l'ouvrier de plus puissants, de plus précis instruments de travail, nous demandons aux artistes plus que ce que le passé nous a légué.

Et tout près de nous ! Combien Rousseau, qui fut, en son temps, un révolutionnaire, nous paraît morne, et si lointain déjà! L'atmosphère qu'il peint, plus pesante qu'une plaque de plomb, est intraversable. Ses chênes et ses châtaigniers ont beau avoir de solides embranchements, ses terrains une lourde ossature: ils ne respirent point, ils ne vivent point ; ses feuillages luisent, mais l'air ne circule pas à travers ce maçonnage grossier et canaille; nulle sève ne gonfle ces végétations inertes, mortuaires, aux dures consistances de métal.

Combien diffèrent de ces crépissages épais où l'aile des oiseaux s'enlise, les ciels de M. Camille Pissarro, ces ciels mouvants, profonds, respirables, où les ondes lumineuses vibrent véritablement, où toutes les voix de l'air se répercutent à l'infini !

Et ces formes. charmantes, légères, si doucement voilées, et pourtant si noblement caractéristiques, ces formes faites de reflets qui passent et