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Page:Desbordes-Valmore - Œuvres complètes, tome 3, Boulland, 1830.djvu/97

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Plus triste que le sol d’où j’arrache mon cœur.
Chaque phare tremblant qui nous prête sa flamme,
Chaque vague qui roule et qui blanchit la rame,
Semble dire en passant : Viens ! livre-nous ton sort !
Si le trépas habite au fond de nos demeures,
Que tu vîves ou que tu meures,
Nous serons avec toi moins perfides encor
Que les mortels ingrats, dont les vaines tendresses,
Dont les sourires faux, dont les feintes caresses,
Ont égaré ta voile et déchiré ton cœur.
Ainsi, voguez, ma barque, et sans guide et sans peur.
Jetez-moi dans l’espace et volez sur les flots,
À travers les écueils, le calme ou les orages.
Pour qui laisse après soi de si cruels rivages,
Les plus cruelles mers sont des champs de repos.
Mais si nous rencontrons quelque sauvage rive,
Où l’air soit pur encore et l’ame encor naïve,
Eden où les médians n’abordèrent jamais,