Page:Desbordes-Valmore - Bouquets et prières, 1843.djvu/18

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
13
PRIÈRES.

Un ruban gris qui serpentait dans l’herbe,
De résédas nouant l’humide gerbe,
Tira mon âme au tertre le plus vert,
Sous la madone, au flanc sept fois ouvert :
Là, j’épelai notre nom de famille,
Et je pâlis, faible petite fille ;
Puis mot à mot : « Notre dernier venu
Est passé là vers le monde inconnu ! »
Cette leçon, aux pieds de Notre-Dame,
Mouilla mes yeux et dessilla mon âme :
Je savais lire ! et j’appris sous des fleurs,
Ce qu’une mère aime avec tant de pleurs.
Je savais lire… et je pleurai moi-même.
Merci, ma sœur : on pleure dès qu’on aime.
Si jeune donc que soit le souvenir ;
C’est par un deuil qu’il faut y revenir ?


Mais, que j’aime à t’aimer, sœur charmante et sévère,
Qui reçus pour nous deux l’instinct qui persévère ;
Rayon droit du devoir, humble, ardent et caché,
Sur mon aveugle vie à toute heure épanché !