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UNE PLUME DE FEMME.

fert avant de voir la porte maternelle se rouvrir devant lui : sans ses larmes amères y serait-il jamais revenu ?

Courez donc, ma plume, courez : vous savez bien qui vous l’ordonne.

Je vous livre mes heures, afin qu’elles laissent, par vous, une faible trace de leur passage dans cette vie. Quand elles traverseront la foule, sur les ailes de mon affliction, si l’on crie : « Elles n’ont pas d’haleine. » Dites que le grillon caché dans les blés forme une musique faible aussi ; mais qui n’est pas sans grâce au milieu du tumulte pompeux des merveilles de la nature ; répondez pour moi ce que Dieu a répondu pour le grillon :

« Laissez chanter mon grillon ; c’est moi qui l’ai mis où il chante. Ne lui contestez pas son imperceptible part de l’immense moisson que mon soleil jaunit et fait mûrir pour tous. »

Courez donc, ma plume, courez : vous savez bien qui vous l’ordonne.

L’austère inconstant, le Sort, qui m’a dit : Assez,