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Page:Desbordes-Valmore - Correspondance intime 1.djvu/49

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m’arracherai de toi, c’est volontairement s’arracher le cœur. Mais sois du moins sans inquiétude, mon voyage a été heureux. Je suis arrivée à six heures. Vis-à-vis la demeure de ton fils, la nourrice, la mère, le mari et Drapier m’attendaient pour m’y conduire. J’y ai couru, je te jure, sans m’apercevoir que j’avais passé une nuit en voiture. J’ai vu ce petit ami pendant une heure. Il est vif comme un poisson, tous ses mouvements sont si rapides qu’à peine on peut examiner ses jolis petits traits mobiles. Sa physionomie est un vrai kaléidoscope, toujours nouvelle et toujours gentille. Sa peau est d’une blancheur étonnante, ses yeux d’un bleu superbe mais moins grands que les tiens. La bouche est en repos quand il dort, mais je ne l’ai pas vu dormir, ainsi elle m’a paru grande, moyenne, imperceptible et de toutes les formes. Il se tient tout droit, et quand on le couche, il se lève fièrement sur ses petites mains pour regarder tout le monde. Il mange avec amour, il boit le sein de sa nourrice jusqu’à la dernière goutte. Ses cheveux sont beaucoup plus blonds qu’en naissant. Il est ravi quand on lui caresse la tête, c’est un petit mouton charmant. J’ai assisté deux fois à sa toilette ; il me paraît d’une grandeur étonnante et il est fait en perfection. Je t’en parlerais une heure que ce serait trop peu pour nous deux. Tout est d’une propreté ravissante autour de lui dans la chaumière.