Aller au contenu

Page:Desbordes-Valmore - Le Salon de lady Betty.djvu/428

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
190
LE BAISER DU ROI.

rait sérieusement ses désirs. Son pouvoir était grand sur son père, mais il n’était pas sans bornes ; bien qu’elle régnât en reine absolue dans leur intime gouvernement, où son goût, ses inclinations et ses caprices étaient consultés en toutes choses, son pouvoir ne s’étendait pas plus loin. C’est celui que tout homme puissant, absorbé par de hautes poursuites, daigne accorder à une femme. Tout sujet politique était donc resté pour Christine un véritable fruit défendu. Le diplomate ne supportait nulle voix féminine en affaires d’état. Depuis peu cependant il avait révélé beaucoup de nouvelles de la cour à sa fille, et toujours il s’en allait louant le jeune monarque dont il se flattait d’être le seul favori, recueillant jour par jour de somptueuses marques de sa partialité. Il est donc facile de s’expliquer comment ce prince guerrier, dont les précoces conquêtes avaient rempli l’Europe d’étonnement et d’admiration, s’était fait, par un jour de curiosité toute neuve en lui, introduire secrètement auprès de la belle Christine, et par quelle influence, en dépit de son antipathie avouée pour le sexe qui ne se bat point, il était alors au nombre des admirateurs cachés d’une jeune fille solitaire et charmante.

Ce premier succès avait puissamment exalté les ambitieuses visions de son père. Il n’était pas d’ailleurs fort déraisonnable de supposer que le jeune homme qui avait commencé son règne en se cou-