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LES PLEURS.

Ces trois planches sont leur patrie ;
Et cette terre en vain chérie
Les repousse de tous ses bords !

En vain de palais et d’ombrage
Ce golfe immense est couronné.
Ils n’ont pour tenir au rivage
Que l’anneau, rongé par l’orage,
De quelque môle abandonné !

Ils n’ont pour fortune et pour joie
Que les refrains de leurs couplets,
L’ombre que la voile déploie,
La brise que Dieu leur envoie,
Et ce qui tombe des filets !

Cette pauvre barque, ô Valmore,
Est l’image de ton destin.
La vague, d’aurore en aurore,
Comme elle te ballotte encore
Sur un océan incertain !

Tu ne bâtis ton nid d’argile
Que sous le toit du passager,
Et comme l’oiseau sans asile,
Tu vas glanant de ville en ville
Les miettes du pain étranger.