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LES PLEURS.

Quoi ! c’est là qu’a brillé ta lampe disparue ?
La jeune perle ainsi colore sa prison !

Où posais-tu tes pieds délicats et sensibles,
Sur le sol irrité que j’effleure en tremblant ?
Quel ange, aplanissant ces sentiers impossibles,
A soutenu ton vol sur leur pavé brûlant ?
Oh ! les cailloux aigus font chanceler la grâce ;
Ici l’enfance, lente et craintive à souffrir.
Pour s’élancer aux fleurs, pour en chercher la trace,
En sortant du berceau, n’apprend pas à courir :
Paresseuse, elle marche ; et sa timide joie
Ressemble au papillon sur l’épine arrêté :
À son instinct rôdeur il boude tout l’été.
As-tu vu ce radeau, longue et mouvante rue,
Qui s’enfuit sur le dos du fleuve voyageur ?
Osais-tu regarder, de mille ondes accrue,
Cette onde qui mugit comme un fléau vengeur !

Non, ce n’est pas ainsi que je rêvais ta cage,
Fauvette à tête blonde, au chant libre et joyeux ;
Je suspendais ton aile à quelque frais bocage,
Plein d’encens et de jour aussi doux que tes yeux !
Et le Rhône en colère, et la Saône dormante,
N’avaient point baptisé tes beaux jours tramés d’or ;
Dans un cercle de feu tourmentée et charmante,