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LES PLEURS.

D’un fil d’or sur lui-même ourdissant la beauté,
Inaperçu dans l’arbre où le vent l’a jeté,
Sous un linceul de feu son ame se rallume !

Oui ! ce sublime atome est le rêve des arts ;
Oui ! les arts dédaignés meurent en chrysalides.
Quand la douce chaleur de caressans regards
Fait pousser par degrés leurs ailes invalides.
Telle, étonnée et triste au bord de son réveil.
Quelque jeune Louise, ignorant sa couronne,
N’ose encor révéler à l’air qui l’environne
Qu’une ame chante et pleure autour de son sommeil.
Car tu l’as dit : long-temps un silence invincible,
Étendu sur ta voix qui s’éveillait sensible,
Fit mourir dans ton sein des accens tout amour,
Que tu tremblais d’entendre et de livrer au jour.

Mais l’amour ! oh ! l’amour se venge d’être esclave.
Fièvre des jeunes cœurs, orage des beaux jours,
Qui consume la vie et la promet toujours,
Indompté sous les nœuds qui lui servent d’entrave,
Oh ! l’invisible amour circule dans les airs,
Dans les flots, dans les fleurs, dans les songes de l’ame,
Dans le jour qui languit trop chargé de sa flamme,
Et dans les nocturnes concerts !