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LES PLEURS.


Mais, tiens ! pour remonter, intrépide hirondelle,
Le chemin lumineux qui ramène au soleil,
Pour partir en aveugle, en joie ! en tire-d’aile,
Et ne voir devant soi que l’horison vermeil,
Il faut mourir enfant ! Il faut, doux somnambule,
S’élançant par la tombe aux jardins sans hivers,
Ne pas se réveiller à la voix des pervers,
Et du sein maternel s’en retourner, crédule
Comme un doux rossignol sort du fond d’une fleur,
Sans avoir répandu sa voix sur la vallée,
Et va frapper aux cieux pour son hymne exilée
Qui ne veut pas apprendre à chanter la douleur.
Beaux enfans ! tout pétris de baisers ! de prières !
Faibles cygnes tombés des célestes bruyères,
Au duvet encor chaud de la main du seigneur,
Et qui ne voulez pas ramper vers le malheur,
Vous faites bien ! Restez à l’alphabet d’un ange,
Dont chaque lettre sainte est un signe d’amour ;
Solfége harmonieux où nul accord ne change,
Et dont la clé sonore ouvre un autre séjour !
Mais, quand dieu nous reprend vos ailes et vos charmes,
Que dit-il de les voir humides de nos larmes ?

Et toi ! viens-tu ? Viens donc ! car au bruit de tes pas
Ma peur s’envolerait : je ne les entends pas !
J’étends mes mains au jour, et je le trouve sombre ;
Je cherche à m’appuyer comme un enfant dans l’ombre ;