Page:Desbordes-Valmore - Poésies, 1860.djvu/106

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« Ne meurs pas, disait-il, ou je meurs avec toi ! »
Et mon âme, enchaînée à cette âme amoureuse,
N’osa quitter la terre et combler son effroi.
L’imprudent ! sous ses pleurs j’allais m’éteindre heureuse,
J’allais mourir aimée. Il m’a rendu des jours,
Pour m’apprendre, ô douleur ! qu’on n’aime pas toujours.
Une nouvelle voix à son oreille est douce ;
D’autres yeux qu’il entend désarment son courroux ;
Et ce n’est plus ma main qu’il presse ou qu’il repousse,
Alors qu’il est tendre ou jaloux.
Quoi ! ce n’est plus vers moi qu’il apporte sans crainte
Son espoir, son désir, son plus secret dessein :
Et, s’il est malheureux, s’il exhale une plainte,
Ce n’est plus dans mon sein !

L’ai-je trahi ? Jamais. Il eut mon âme entière.
Hélas ! j’étais étreinte à lui comme le lierre.
Que pour m’en arracher il a fallu souffrir !
Dans cet effort cruel je me sentis mourir.
Il détourna les yeux, il n’a pas vu mes larmes ;
Mon reproche jamais n’éveilla ses alarmes ;
Jamais de ses beaux jours je ne ternis un jour ;
Il garda le bonheur ; moi, j’ai gardé l’amour.





POINT D’ADIEU


Vous, dont l’austérité condamne la tendresse,
Vous, dont le froid printemps s’est perdu sans ivresse,