Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, I.djvu/192

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En ſuite de quoy la ſixiéme propoſition eſt fort aiſée à entendre : ſcripturam inuenire etc. ; car mettant en ſon dictionnaire vn ſeul chifre, qui ſe raporte à aymer, amare, φιλεῖν, & tous les ſynonimes, le liure qui ſera écrit auec ces caracteres pourra eſtre interprété par 5 tous ceux qui auront ce dictionnaire.

La cinquiéme propoſition n’eſt auſſi, ce ſemble, que pour loüer ſa marchandiſe, & ſi-toſt que ie voy ſeulement le mot d’arcanum en quelque propoſition, ie commence à en auoir mauuaiſe opinion ; mais ie croy 10 qu’il | ne veut dire autre choſe, ſinon que pource qu’il a fort philoſophé ſur les grammaires de toutes ces langues qu’il nomme, pour abreger la ſienne, il pourroit plus facilement les enſeigner que les maiſtres ordinaires. 15

Il reſte la troiſiéme propoſition, qui m’eſt tout à fait vn arcanum ; car de dire qu’il expliquera les penſées des anciens par les mots deſquels ils ſe ſont ſeruis, en prenant chaque mot pour la vraye definition de la choſe, c’eſt proprement dire qu’il 20 expliquera les penſées des anciens en prenant leurs paroles en autre ſens qu’ils ne les ont iamais priſes, ce qui répugne ; mais il l’entend peut-eſtre autrement.

Or cette penſée de reformer la grammaire, ou plutoſt d’en faire vne nouuelle qui ſe puiſſe aprendre en 25 cinq ou ſix heures, & laquelle on puiſſe rendre commune pour toutes les langues, ne laiſſeroit pas d’eſtre vne inuention vtile au public, ſi tous les hommes ſe vouloient accorder à la mettre en vſage, ſans deux inconueniens que ie preuoy. Le premier eſt pour la 30 mauuaiſe rencontre des lettres, qui feroient ſouuent