Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, I.djvu/330

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quelque autre à les augmenter de ſes recherches & de ſes obſervations. C’eſt ce que je ſouhaiterois que tout le monde voulût faire, pour être aidé par l’experience de pluſieurs à découvrir les plus belles choſes de la nature, & bâtir une Phyſique claire, 5 certaine, demonſtrée, & plus utile que celle qui s’enſeigne d’ordinaire. Vous pourriez beaucoup ſervir de vôtre côté à deſabuſer les pauvres malades d’eſprit touchant les ſophiſtications des metaux, ſur leſquels vous avez tant travaillé & ſi inutilement, ſans que 10 vous ayez vû rien de vray en douze années d’un travail aſſidu & d’un grand nombre d’experiences qui ſerviroient fort utilement à tout le monde en avertiſſant les particuliers de leurs erreurs. Il me ſemble même que vous avez déja découvert des generalitez 15 de la nature : comme, qu’il n’y a qu’une ſubſtance materielle, qui reçoit d’un agent externe l’action ou le moien de ſe mouvoir localement, d’où elle tire diverſes figures ou modes, qui la rendent telle que nous la voyons dans ces premiers compoſez que l’on 20 appelle les elemens. De plus vous avez remarqué que la nature de ces elemens ou premiers compoſez appelez Terre, Eau, Air, & Feu, ne conſiſte que dans la difference des fragmens ou petites & groſſes parties de cette matiere, qui change journellement de 25 l’un en l’autre par le chaud & le mouvement des groſſieres en ſubtiles ; ou en innobles, c’eſt-à-dire, de ſubtiles en groſſieres, lors que l’action du chaud & du mouvement vient à manquer. Que de la premiere mixtion de ces quatre premiers il reſulte un melange 30 qui pourroit être appelé le cinquième element, ce