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Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, IX.djvu/119

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1 17-119. Premières Réponses. Cfj

point icy du lion ni du cheual, pource que leurs natures ne nous font pas encore entièrement connues), alors certes toutes les chofes que ie reconnoiftray eftres contenues dans l'idée du triangle, comme que fes trois angles font égaux à deux droits, &c., ie l'affeureray auec vérité d'vn triangle ; '& d'vn quarré, tout ce que ie trouueray eltre contenu dans l'idée du quarré ; car encore que ie puiffc conce- |uoir vn triangle, en reftraignant tellement ma penfée, que ie ne 150 conçoiue en aucune façon que fes trois angles font égaux à deux droits, ie ne puis pas neantmoins nier cela de luy par | vne claire & diftincle opération, c'eft à dire entendant nettement ce que ie dis. De plus, fi ie confidere vn triangle infcrit dans vn quarré, non afin d'attribuer au quarré ce qui apartient feulement au triangle, ou d'attribuer au triangle ce qui apartient au quarré, mais pour exa- miner feulement les chofes qui naiffent de la conjonction de l'vn & de l'autre, la nature de cette figure compofée du triangle & du quarré ne fera pas moins vraye & immuable, que celle du feul quarré ou du feul triangle. De façon que ie pouray alTurer auec vé- rité que le quarré n'eft pas moindre que le double du triangle qui luy eft infcrit, & autres chofes femblables qui appartiennent à la nature de cette figure compofée. Mais fi ie confidere que, dans l'idée d'vn corps tres-parfait, l'exiftence efi contenue, & cela pource que c'eft vne plus grande perfeftion d'ellre en effed & dans l'entende- ment que d'efire feulement, dans l'entendement, ie ne puis pas de là conclure que ce corps tres-parfait exilte, mais feulement qu'il peut exifter. Car ie reconnois afiez que cette idée a elle faite par mon en- tendement, lequel a ioint enfembie toutes les perfe.dions corpo- relles; & auffi que l'exillence ne refùlte point des autres perfections qui font comprifes en la nature du corps, pource que l'on peut éga- lement affirmer I ou nier qu'elles exiitent. Et de plus, à caufe qu'en 151 examinant l'idée du corps, ie ne voy en luy aucune force par la- quelle il fe produife ou fe conferue luy-mefme, ie conclus fort bien que l'exifience necelfaire, de laquelle feule il eft icy queftion, con- uient auffi peu à la nature du corps, tant parfait qu'il puilfe eltre, qu'il apartient à la nature d'vne montagne de n'auoir point de valée, ou à la nature du triangle d'auoir fes trois angles plus grands que deux droits. Mais maintenant, fi nous demandons, non d'vn corps, mais d'vne choie, telle qu'elle puiffc eftre, qui ait toutes les | per- fections qui peuuent eftre enfembie, fçauoir fi l'exiftence doit eftre comtée parmy elles; il eft vray que d'abord nous en pourons douter, parce que noftre efprit, qui eft finy, n'ayant pas couftume de les confiderer que feparées, n'aperceura peut-eitre pas du premier coup,

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