Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, IX.djvu/129

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i2g-i3i. Secondes Réponses. ioj

de connoiflance de ceux auec qui nous conuerfons tous les iours, que de ceux dont nous ne connoiiïons que le||nom ou le vifagc ; 168 & toutesfois nous ne iugeons pas que ceux-cy nous l'oyent tout à fait inconnus ; auquel fens ie penfe auoir allez demonftré que rcl- prit, confideré fans les chofes que l'on a de coullume d'attribuer au corps, eft plus connu que le corps confideré fans l'efprit. Et c'ell tout ce que i'auois deffein de prouuer en cette féconde Méditation.

Mais ie voy bien ce que vous voulez dire, c'efl: à fçauoir que, n'ayant efcrit que lix Méditations touchant la première Philofophie, les Ledeurs s'eftonneront que, dans les deux premières, ie ne con- clue rien autre chofe que ce que ie viens de dire tout maintenant, & que pour cela ils les trouueront trop lleriles, & indignes d'auoir efté mifes en lumière. A quoy ie répons feulement que ie ne crains pas que ceux qui auront leu auec iugement le refte de ce que i'ay efcrit, ayent occafion de foupconner que la matière m'ait manqué ; mais qu'il m'a femblé tres-raifonnable que les chofes qui de- mandent vne particulière attention, & qui doiuent ertre confiderées feparément d'auec les autres, fuffent mifes dans des Méditations feparées.

G'eit pourquoy, ne fçachant rien de plus vtile pour paruenir à vne ferme & alfeurée connoiffance des chofes, que fi, auparauant qu'e de rien établir, on s'acoultume à douter de tout & principale- ment des chofes corporelles, encore que i'euife veu il y a long-temps plufieurs liures efcrits par les Sceptiques & Académiciens touchant cette matière, & que ce ne | fuit pas fans quelque dégoull que ie 169 remâchois vne viande fi commune, ie n'ay peu toutesfois me dif- penfer de luy donner vne Méditation tout entière ; & ie voudrois que les Lecteurs n'employaffcnt pas feulement le peu de temps qu'il faut pour la lire, mais quelques mois, ou du moins quelques femaines, à confiderer les chofes dont elle traitte, auparauant que de palTer outre ; car ainfi ie ne doute point qu'ils ne filfent bien mieux leur profit de la ledture du relie.

De plus, à caufe que nous n'auons eu iufques icy aucunes idées des chofes qui apartiennent à l'efprit, qui n'ayent elle tres-confufes & I mêlées auec les idées des chofes fenfibles, & que c'a elle la pre- mière & principale raifon, pourquoy on n'a peu entendre alfez clairement aucunes des chofes qui le difoient de Dieu & de l'amc, i'ay penfé que ie ne ferois pas peu, fi ie monllrois comment il faut diitinguer les proprietez ou qualitez de l'efprit, des proprietez ou qualitcz du corps, & comment il les faut reconnoillre ; car, encore qu'il ait défia elté dit par plufieurs que, pour bien entendre les

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