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142 Œuvres de Descartes. isa-iw.

la choj'e que l'on craint. Car qii'e/l-ce autre choj'e que la crainte d'i'n lion qui s'auance vers nous, finon l'idée de ce lion, & l'effeâ [qu'tme telle idée engendre dans le cœur) par lequel celuy qui craint ejt porté à ce mouuement animal que nous apelons fuite ? Maintenant ce jnou- uement de fuite n'ejl pas i>ne penfée; & partant, il rejte que, dans la crainte, il n'y a point d'autre penfée, que celle qui confifte en la rejfem- blance de la chofe que l'on craint. Le mefme fe peut dire auffi de la volonté.

Dauantage, l'affirmation & la négation ne fe font point fans pa- role & fans noms ; d'oie vient que les be/les ne peuuent rien affirmer nj nier, non pas mefme par la penfée, & parlant, ne peuuent auffi faire aucun ingénient. Et neantmoins la penfée peut ejlre femblable dans vn homme & dans vue befte; car, quand nous affirmons qu'vn homme court, nous n'auons point d'autre penfée que celle qu'a vn chien qui voit courir fon maijlre, & partant, l'affirmation & la négation n'adioutent rien aux fimples penfées, fi ce n'eJl peut-ejîre la penfée que les noms, dont l'affirmation e/l compofée, font les noms de la chofe mefme qui ejl en l'efprit de celuy qui affirme; & cela nejl rien 237 autre chofe \ que comprendi-e par la penfée la rejfemblance de la chofe, mais cette rejfemblance deux fois.

Réponse.

Il eft de i'oy tres-euident, que c'eit autre choie de voir vn lion, & enfemble de le craindre, que de le voir feulement; & tout de mefme, que c'cll autre chofe de voir vn homme qui court, que d'af- furerl qu'on le void. Et ie ne remarque rien icy qui ait befoin de réponfe ou d'explication.

��OBŒCriON SEPTIEME.

Il me relie ieulement à examiner de quelle façon i'ay acquis cetie idée; car ie ne I'ay point receuë par les Cens, & iamais elle ne s'eft offerte à moy contre mon attente, comme font les idées des chofes fenfibles, lorfquc ces choies fe prefentent aux organes extérieurs de mes fens, ou qu'elles femblent s'y prcfenter. Elle n'ell pas auflî vne pure production ou fiction de mon efprit. car il n'elt pas en mon pouuoir d'y diminuer, ny d'y adiouter aucune chofe ; & partant, il ne relie plus autre chofe à dire, finon que, comme l'idée de moy- mefme, elle ell née & produite auec moy, dez lors que i'a\- efté créé.

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