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��OEuvREs DE Descartes.

��eftendu en longueur, largeur & profondeur, nous auons raifon de conclure qu'il ell vne fubltance, à caufe que nous conceuons qu'il n'eft pas poiïîble que ce qui n'eft rien ait de l'extenfion, nous deuons conclure le mei'me de l'efpace qu'on fuppofe vuide : à fçauoir que, puis qu'il V a en luy de l'extenfion, il y a necelTairement aulli de la fubftance.

77. Que le mot de vuide pris félon l'vfage ordinaire n'exclud point toute forte de corps.

16 Mais lors que nous prenons ce mot félon | l'vfage ordinaire, & que nous difons qu'vn lieu eft vuide, il e(l confiant que nous ne vou- lons pas dire qu'il n'y a rien du tout en ce lieu ou en cet efpace, mais feulement qu'il n'y a rien de ce que nous prefumons y deuoir ertre. Ainfi, pource qu'vne cruche eft faite pour tenir de l'eau, nous difons qu'elle eft vuide lors qu'elle ne contient que de l'air; & s'il n'y a point de poilîon dans vn viuier, nous difons qu'il n'y a rien dedans, quoy qu'il foit plein d'eau ; ainfi nous difons qu'vn vaift"eau eft vuide, lors qu'au lieu des marchandifes dont on le charge d'ordi- naire, on ne l'a chargé que de fable, afin qu'il puft refifter à l'impe- tuofité du vent : & c'eft en ce mefme fens que nous difons qu'vn efpace eft vuide, lors qu'il ne contient rien qui nous foit fenfible, encore qu'il contienne vne matière créée & vne fubftance eftenduë. Car nous ne confiderons ordinairement les corps qui font proches de nous, qu'en tant qu'ils caiifent dans les organes de nos fens des impredions 7?/o/-/t's, que nous pouuons les fenlir. Et fi, au lieu de nous fouuenir de ce que nous deuons entendre par ces mots de vuide ou de rien, nous penfions par après qu'vn tel efpace..., où nos fens ne nous font rien apperceuoir, ne contient aucune chofe créée, nous tomberions en vne erreur aufti groffiere que li, à caufe qu'on dit

77 ordinaire|ment qu'vne cruche eft vuide, dans laquelle il n'y a que de l'air, nous jugions que l'air qu'elle contient n'eft pas vne chofe ou vne fubftance.

18. Comment on peut corriger la fauffe opinion dont on efl préoccupé

touchant le vuide.

Nous auons prefque tous efté préoccupe^ de cette erreur dés le commencement de noftre vie, parce que, voyant qu'il n'y a point de liaifon neceffaire entre le vafe & le corps qu'il contient, il nous a femblé que Dieu pourroit ofter tout le corps qui eft contenu dans

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