Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, V.djvu/497

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DLXXXVI. — 10 Février 1650. 48?

» médiocrité de sa fortune et dans vne retraitte si éloignée, du soin et de » l'entretien, le diray-je, de sa Nourrice, pour la subsistance de laquelle, » i'av vu dans ses lettres' plusieurs ordres donnez à celuy qui auoit le » soi'n de ses affaires. Ce qui marque sans doute vne bonté d'ame tout a » fait grande, et qui meritoit d'estre recompensée, comme elle a este, » d'vne fin aussi heureuse et aussi paisible que celle que Monsieur Des- >, cartes a eue, soumise et resignée entièrement aux volontez de Dieu, » plaine d'espérance en ses bornez, et de confiance en ses miséricordes ; >, et en vn mot qui a esté telle, qu'il a laissé à tous ceux qui l'ont assiste a » la mort, vn souhait d'en auoir vne aussi précieuse deuant Dieu, qu il a » donné lieu de croire et d'espérer qu'a esté la sienne. »

« Ce récit simple, mais fidèle, des circonstances de son trépas, est, ce » me semble, capable de fermer d'oresnauant la bouche à la calomnie, et » iustihe assez l'innocence et la sainteté de sa mort; mais il ne taut point » en chercher de preuue plus conuaincante, que celle de rmtegrité mesme » de sa vie. qui n'a iamais esté attaquée que par des médisans ou par des » enuicux, et qui a tousiours paru d'autant plus pure, qu'on a tasché de » la noircir. Toutes ses lettres, qui sont pleines des plus beaux enseigne- » mens de l'vne et de l'autre Morale, feront assez connoistre l'intérieur de » son ame ; et comme il n'a iamais sçeu ce que c'estoit que de dissimuler, » tenant pour maxime, que la plus grande finesse estait de nen auoir ,, point, ei qu'il a tousiours tenu pour ses ennemis ouuerts et déclarez » ceux qui ont eu cette opinion de luy, qu'il ne parloit pas comme il pen- » soit; ne doit-on pas auoir des sentiments tres-auantageux de sa probité » et de sa vertu, puis qu'il n'v en a aucune, dont il ne nous enseigne les ). maximes dans ses lettres? ce qu'il fait auec tant de iugement et de taci- ., lité, qu'il fait assez connoistre, en les enseignant aux autres, que la pra- » tique luven estoit familière. »

<■ Au reste, ie ne puis m'imaginer ce qu'ont prétendu ceux qui. pour .. ternir sa réputation et pour decrediter sa doctrine, ont semé ces taux ., bruits, que la Reine Christine, n'ayant pu entrer dans ses pensées, ny ., prendre aucun goust à ses nouuelles opinions, ne l'auoit pas beaucoup >, considéré, et que cela l'auoit ietté dans vne melancholie si profonde, » qu'elle luy auoit enfin causé la mort. Peut-on mieux iuger de la haute ., estime que cette Reine en faisoit. que par l'assiduité qu'elle-mesme „ aportoit pour l'entendre, et par le temps quelle auoit choisi pour cet en- ,, tretien, qui luv sembloit si précieux qu'elle le preferoit à son repos ? » A. quov il estoit aussi de son costé si soigneux d'obéir et de satisfaire, » que, le iour mesme qu'il se sentit du mal, il s'y estoit rendu à l'heure » précise, et auoit mesme porté à la Reine l'ordre à garder dans vne con- » ference de lettres \ qu'elle vouloit établir à iour certain dans sa Biblio-

a. Lettres perdues. Voir cependant lettre DLXXXVI ci-avant, p. 470.

b. Note MS. : « Il est dans les fragmens a la fin de cet ouurage. i- (Inst.)

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