Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, XII.djvu/281

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hardi navigateur, qui a découvert aussi un Nouveau Monde : c’était le compliment à la mode[1]. Puis, comme sujet de ses objections, il choisit l’arc-en-ciel, et se plaçant au point de vue même de Descartes, il engagea avec lui une discussion très habile et très serrée. Notre philosophe en profita pour éclaircir cette matière, qu’il estimait des plus difficiles, et fut amené à découvrir un peu plus le fond de sa pensée. La lutte reste courtoise ; Descartes ménage plutôt les trois professeurs, qui, s’ils étaient gagnés, pourraient introduire dans leur enseignement la philosophie nouvelle. Illusion pure : le cartésianisme sera condamné à Louvain, en 1662, un peu avant même de l’être à Rome ; et Plempius, devenu un personnage après avoir accompagné comme médecin l’ambassadeur du roi d’Espagne au congrès de Munster, s’emploiera de toutes ses forces, dès son retour en 1648, contre la doctrine de son ancien ami : il sera un des principaux artisans de la condamnation[2].

Descartes attendait aussi des objections de Lille, où les Jésuites avaient un collège[3]. Mais elles n’ont pas été conservées ; (ont-elles même été envoyées ?) Il semble avoir eu un moment l’espoir d’étendre sa propagande dans tous les Pays-Bas espagnols, en Flandre aussi bien que dans le Brabant, et aux deux Universités de Louvain et de Douai. Peut-être fit-il tout exprès dans cette vue le voyage de Douai en 1637 ? Un document postérieur l’assure, avec des détails tels, qu’on ne peut croire qu’il ait été inventé de toutes pièces : c’est le récit d’un

  1. Tome II, p. 55, l. 10-11 : « …quod, notis quaſi littoribus reliftis, Noui Orbis periculum facere audeat ».
  2. Déjà la 3e édition des Fundamenta Medicinæ, en 1654, donnait cet appendice : Doctorum aliquot in Academiâ Lovanienſi Virorum Iudicia de Philoſophiâ Carteſianâ, avec une Cenſura, du 6 oct. 1653. Et la 4e édition, en 1664, donne dans une Préface tout l’historique de la condamnation de 1662. Plempius l’avait annoncée, et même celle de Rome, dans la 3e édition d’un autre ouvrage, Ophthalmographia, 1659 (dont la première édition remontait à 1632).
  3. Tome II. p. 50, l. 6-7 : mars 1638.