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Page:Descaves - La Vie douloureuse de Marceline Desbordes Valmore.djvu/190

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MARCELINE DESBORDES-VALMORE

raient rue de Clermont no 1, c’est-à-dire qu’ils pouvaient voir de leur grenier la place des Terreaux où avaient lieu l’exposition publique des condamnés aux travaux forcés et les exécutions capitales.

Depuis 1834, la marque était abolie, mais du premier supplice au dernier, il y avait encore de quoi abreuver de tristesse et de dégoût un cœur pitoyable. Aussi Marceline écrivait-elle à son ami Lepeytre, secrétaire général de la mairie de Marseille :

Quand je vois un échafaud, je m’enfonce sous terre, je ne peux ni manger ni dormir. Les galères, mon Dieu ! pour six francs, pour dix francs, pour une colère, pour une opinion fiévreuse, entêtée… Et eux ! les riches, les puissants, les juges ! Ils vont au spectacle après avoir dit : À mort ! Monsieur, je suis malheureuse. Mon cœur est comme cela, et je loge vis-à-vis d’une prison, sur une place où l’on attache des hommes à ce poteau plus triste que le cercueil.


Mais pour qui, un jour de décembre 1835, s’est-elle coiffée d’un foulard jaune et a-t-elle complété ce bout de toilette par des manches à gigot et un petit tablier de soie ? Pour le bon Dumas qui vient les voir, au retour d’un voyage en Italie. Toujours dévoué, il promet à Valmore de lui trouver quelque chose. Quoi ? Il n’en sait rien. Valmore non plus. « Réveillé de ses beaux rêves d’artiste, » dit Marceline, il songe à ouvrir une maison d’éducation à Paris… ; à emmener sa famille dans une cour