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MARCELINE DESBORDES-VALMORE

rempli l’emploi des ingénuités ; mais élevée à l’air libre, n’ayant passé à l’école que le temps d’apprendre à épeler ses lettres, sa nature naïve n’avait pas eu à subir les entraves d’uni’éducation de pensionnat. Elle avait la gaieté et l’imprévu du moineau franc, qu’elle appelait si bien le paysan des oiseaux. Les inflexions de sa voix étaient fraîches, naturelles… Elle possédait une diction d’une grande pureté… Son jeu, son débit, étaient d’une telle vérité que le spectateur pouvait se demander en l’écoutant s’il était au théâtre : elle semblait le personnage même qu’elle représentait… Mlle Mars a maintes fois témoigné la haute estime qu’elle faisait de son talent.


Sera-t-il jaloux davantage des lauriers que sa femme cueillera dans les Lettres ? Il écrit, lui aussi, il est inspiré ; je veux dire qu’il met sur leurs douze pieds des vers qui riment entre eux. Or, si l’on ne possède pas beaucoup d’échantillons de ses aptitudes poétiques, on en a du moins conservé l’hommage fervent : À celle que j’aime, qui finit ainsi :

Amour, telle est ma vie en son brûlant voyage :
Mes jours, en s’écoulant, me laissent ton image.


Ils étaient déjà mariés depuis quinze ans, lorsqu’elle lui écrivait :

Je te défends, d’abord, de le fanatiser sur le peu que je vaux, ce qui te rendrait irritable et injuste contre ceux dont tu me croirais méconnue.