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L’ENFANT

tion de la fille du fermier citadin s’amalgamaient avec l’ignorance, la crédulité et l’obstination de la paysanne. La fermentation de ce mélange exposait Catherine à extravaguer, et elle extravagua, en effet, du jour où elle espéra le salut, non plus d’un parent de Hollande, mais de certaine cousine d’Amérique, mariée avec un planteur qui avait censément fait fortune aux Antilles !

Quel est l’auteur responsable de cette suggestion ? Qui montra ce nouveau miroir scintillant à la pauvre alouette égarée ? Mystère. Mais nous en savons assez maintenant pour imaginer les scènes de ménage dont la petite maison de la rue Notre-Dame fut le lieu et dont Marceline ne voulut jamais se souvenir.

Son père feignait également de les avoir oubliées. « Le sombre passé ne lui plaisait pas à visiter, à en juger par le silence dont il accueillait nos questions. Il y répondait seulement quelquefois, d’un ton doux et sérieux : “Bah ! qu’est-ce que cela fait[1] ?” »

On devine le tourment de cet homme affectueux, faible et triste, qui s’entendait reprocher du matin au soir son inaction prolongée, ses démarches inutiles, sa diplomatie maladroite… Que faire ? Comment sortir d’embarras ?… Les cousins des Antilles… Ah ! dès l’instant que Catherine se propose d’avoir recours à eux, d’aller elle-même les solliciter, comme on voit bien, au bord du toit,

  1. Albums de Douai. Notes manuscrites de Mme Valmore.