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Martyrs sont la seule épopée qui puisse être lue de nos jours, parce qu’elle est en prose, et surtout en prose de M. de Chateaubriand ; et à l’exemple de lord Byron, il a su renfermer la poésie épique dans des compositions d’une moyenne étendue et toutes inventées ; il a su être grand sans être long. M. de Lamartine a jeté dans ses admirables chants élégiaques toute cette haute métaphysique sans laquelle il n’y a plus de poésie forte ; et ce que l’âme a de plus tendre et de plus douloureux s’y trouve incessamment mêlé avec ce que la pensée a de plus libre et de plus élevé. L’élégie, sur sa lyre, est devenue immense. Enfin M. Victor Hugo a non-seulement composé un grand nombre de magnifiques odes, mais on peut dire qu’il a créé l’ode moderne ; cette ode, d’où il a banni les faux ornemens, les froides exclamations, l’enthousiasme symétrique, et où il fait entrer, comme dans un moule sonore, tous les secrets du cœur, tous les rêves de l’imagination, et toutes les sublimités de la philosophie.

La grande poésie française de notre époque (toujours abstraction faite du théâtre) nous semble donc principalement représentée par MM. Victor Hugo, de Lamartine et Alfred de Vigny, autant à cause de leur talent que parce qu’ils l’ont appliqué à des genres dont notre lan-