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tion de Racine est sans doute admirable, mais celle de Corneille, de Molière et de La Fontaine est admirable aussi par des qualités toutes différentes. Ceux qui ne comprennent pas d’autre mélodie que celle des vers de Racine, ne sont pas capables même de sentir les beautés de ce grand poète. Ils font l’effet de ces latinistes qui sont tout déconcertés quand on les sort de l’hexamètre de Virgile, ou du pentamètre d’Ovide. Des vers ne sont point durs pour n’être pas composés dans le système harmonique de Racine. L’harmonie de Mozart n’a rien de commun avec celle de Cimarosa. Parce qu’une partition semble obscure à des yeux peu exercés y elle n’en sera pas moins belle à l’oreille quand elle sera exécutée avec le sentiment de l’art. Certains beaux vers sont plus dificiles à réciter que certains autres ; mais qu’une voix habile vous les lise, et vous serez surpris d’y trouver des grâces et des effets que vous chercheriez en vain dans des vers en apparence plus mélodieux. La période arrondie, les vers symétriquement cadencés, l’euphonie continuelle des sons, forment les principales qualités de la versification racinienne, et cette manière a prévalu jusqu’à l’abbé Delille, qui l’a outrée au point de la rendre méconnaissable. Cet abbé, avec tout son esprit et tout son