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nos vers l’indépendance de la césure et de l’enjambement, et ces formes elliptiques, et cette allure jeune et vive, dont ils n’avaient presque plus de traces. C’est le mode de versification que suit l’école actuelle qui a repris aussi à nos anciens poètes cette richesse élégante de rimes, trop négligée dans le dernier siècle ; car la rime est le trait caractéristique de notre poésie ; il faut qu’elle soit une parure, pour n’avoir pas l’air d’une chaîne, et des vers rimés à-peu-près sont comme des vers qui auraient presque la mesure. Ce vers renouvelé a le grand avantage d’avoir été, beaucoup moins employé et surtout d’offrir beaucoup plus de ressources et de variété ; le récit poétique ne nous paraît même possible que de cette manière. Les repos réguliers et les formes carrées des autres vers sont, insupportables dans un poème de longue haleine ; l’admiration devient bientôt de la fatigue. Les personnes peu familiarisées avec la versification d’André Chénier et de nos jeunes poètes se perdent dans les déplacemens de césure et dans les enjambemens, et crient à la barbarie et à la prose ; ce sont elles qui sont prosaïques et barbares.

Barbarus hic ego sum qui non intelligor illis.

Comment ne sent-on pas que le rhythme con-