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tinue sous ce désordre apparent et qu’il n’y manque rien que la monotonie ! D’ailleurs, un mode n’exclut pas l’autre ; c’est tout bénéfice. L’art est de les combiner et de les faire jouer dans des proportions et à des distances justes et harmoniques. Lorsqu’après une page de narration écrite en vers si faussement nommés prosaïques, se trouve une suite de beaux vers d’inspiration, pleins et cadencés, comme ceux de l’ancienne école ; ils se détachent avec bien plus de grâce et de noblesse, et l’effet en est bien plus puissant. C’est un chant suave et pur qui sort d’un récitatif bruyant et agité. Que peut dire un poète, quand il s’entend reprocher des contrastes comme des dissonnances, et des choses étudiées comme des négligences ou des distractions ? Rien ; à moins qu’il ne dise avec Voltaire :

« Qui n’aime pas les vers a l’esprit sec et lourd,
« Je ne veux pas chanter aux oreilles d’un sourd. »

C’est une bien grande erreur aussi de croire que tels versificateurs font mieux les vers que tels poètes. Le talent suit toujours le génie. Sans doute, avec du travail et une organisation assez heureuse, on parvient dans les vers, comme dans tous les arts, à une certaine élégance vulgaire , à une froide correction, à une mélodie