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Page:Deschamps - Marivaux, 1897.djvu/130

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MARIVAUX.

pliant, si elles pouvaient lui être bonnes à quelque chose. T’amuse-t-elle ?

— Je ne la hais pas.

— Tout de bon ?

— Oui ; comme elle ne m’est pas destinée, je l’aime assez. »

Cela, c’est le dernier trait, le fin du fin. Rosimond pirouette, il rit aux éclats.

« Ah ! Ah ! Ah ! que tu es réjouissant ! »

Pendant la conversation qui vient d’être rapportée, Hortense se promenait dans la grande allée du parc, du côté de l’orangerie. Le hasard avait voulu qu’elle trouvât une lettre, adressée à son fiancé par la vieille comtesse ridicule. Moitié fâchée par cette rencontre, moitié divertie par le ton burlesque de cette épître, elle fit part, négligemment, à Rosimond, de sa trouvaille, et joua, en perfection, un rôle d’indifférente. Même, elle assaisonna sa tranquillité feinte d’un grain d’impertinence maligne. Elle s’amusa de sa déconvenue, comme ces jeunes filles de Watteau qui agacent un chat avec un peloton de fil. Elle laissa entendre à ce joli garçon qu’elle l’eût aimé peut-être si elle ne l’avait pas trouvé un peu trop plaisant et qu’elle s’est détachée de lui, parce que, malheureusement, « ce qui fait rire n’attendrit plus ». Elle lui insinua qu’elle avait pensé mourir de rire en apprenant qu’il avait lié une petite affaire de cœur avec une vieille comtesse. Elle lui notifia que la province ne sentait point le mérite des belles manières de la cour, et que la peine qu’il prenait était autant de perdu.

Rosimond, pour la première fois de sa vie, se